Il la regarde, bras croisés et la mine passablement sceptique, alors que son regard à elle pétille de malice. Elle ne détourne pas les yeux, se contentant de l'observer, les mains sagement posées sur ses genoux. Depuis combien de temps sont-ils là ? Assis, à se regarder en chiens de faïence ? Difficile à dire. Mais elle s'en amuse alors qu'elle lisse un pli imaginaire de sa cape rouge. Le Maréchal finit par souffler, d'une voix pensive.
« ... Vous leur faites peur. Et je suis incapable de trouver pourquoi. Vous êtes à peine plus haute que deux pommes et demie à genoux. Et pourtant, ils vous regardent avec des yeux écarquillés. Je ne comprends pas. »

7 - Tissette
Armé de ta fine connaissance dans le domaine de la conception des bébés, tu disposes d'un avantage considérable au combat.
Elle sourit largement, haussant les épaules, sans lui répondre.
« Certains ont même parlé de... magie. C'est ce que vous êtes ? Une mage ? »

Elle bat des cils avant de finir par souffler, d'une voix flûtée.
« Je suis magicienne à mes heures perdues ! Vous voulez voir un tour de cartes ? »

Un bref hochement de tête du Maréchal et voilà qu'elle sort un jeu de cartes d'on ne sait où. Pour le déposer devant lui. Et tourner autour de la table avant de se rassoir.
« ... voilà mon tour de cartes. Et, sinon, si vous comptez passer du temps avec une femme, sachez qu'il y a 9 chances sur 10 pour que vous mettiez en route un petit garçon. Ce sera même du 100% si vous renouvelez la chose. Et avec un gaillard vigoureux comme vous, je m'inquiète pas. »

Il fronce les sourcils avant de taper du poing sur la table.
« Vous trouvez ça amusant peut-être ?! Moi pas du tout ! »

Et elle hausse de nouveau les épaules, avant de reprendre, de cette petite voix charmante.
« Votre major va bientôt être grosse. Une semaine, peut-être deux. Oh et j'ai annoncé au garde qui m'a arrêtée que sa femme allait avoir un bébé. Sauf qu'il ne l'a pas vue depuis un an. Je peux comprendre qu'il se soit un peu agacé. Mais c'est amusant de concevoir des bébés non ? Vous ne trouvez pas ? Je sais, vous essayez depuis longtemps avec votre épouse sans succès. »

Elle se tapote le bout du nez alors qu'il fulmine devant elle, prêt à lui bondir dessus.
« Les enfants sont le nerf de la guerre. Plus il y en aura, plus vous aurez de soldats sous vos ordres. Oh, je sais, il faudra un peu de temps pour qu'ils soient efficaces mais, en attendant, leurs parents se battront avec une hargne décuplée pour les protéger. »

Elle se penche alors vers lui, le regard pétillant.
« ... et moi je peux vous dire qui peut faire un enfant et à quel moment. Ce n'est pas merveilleux ? »

Elle frappe joyeusement dans ses bras alors qu'il la fixe totalement éberluée. Pourtant, elle n'a pas tort, si l'on oublie de prendre en compte qu'elle semble bénie par un dieu idiot, comme Arté, qui devrait vraiment lui prêter sa camisole. Les enfants sont importants et pourraient faire basculer ce conflit, d'une façon ou d'une autre. Parce que cette guerre dure depuis de nombreuses générations. Et que les bras commencent à manquer, que ce soit pour travailler aux champs ou pour se battre. Il plisse des yeux avant de reprendre, d'une voix calme.
« Prouvez-le. »

Et elle tousse un rire joyeux.
« Demandez à votre garde. Qu'il prenne des nouvelles de sa femme. Par contre, vous avez compris que je ne me contente pas de prédire les choses. Je choisis. Je sélectionne. Et je me moque des couples, des mariages, des affinités. Il faudra que vous en fassiez de même. »

Il claque des doigts et appelle le garde, lui demandant de faire venir son épouse. S'il est sceptique, pour ne pas dire furieux, il s'exécute et envoie un mage des portails. Et le Maréchal croise les bras, fixant la jeune femme, dubitatif.
« ... en attendant, que dois-je faire de vous ? »

Elle se relève pour s'assoir sur le bureau, son regard ancré dans le sien.
« Nous le savons tous les deux. C'est moi qui porterai votre enfant. Alors vous allez faire ce qu'il faut pour ça. »

Si le Maréchal arbore une mine sceptique, quelque chose dans les yeux de la jeune femme l'empêche de répondre par la négative, alors que le silence semble soudain s'éterniser entre eux. Il faudra attendre trois jours pour voir arriver l'épouse du garde, le ventre rond et la mine confuse. Et le Maréchal, totalement subjugué, décidera d'écouter la jeune femme dont le ventre, ainsi que celui de beaucoup d'autres, finit par également s'arrondir. En moins de deux ans, la population serait multipliée par deux, grâce à ses prédictions. Quand bien même personne d'autre, à part le Maréchal, n'acceptait de l'approcher. Mais elle portait son enfant après tout, quelle que soit la façon dont les choses s'étaient passées.

Et... bien évidemment, pour ceux qui avaient des doutes... ce fut un garçon.